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23 janvier 2014

70 ans de Château Larcis Ducasse !

70 ans de Château Larcis Ducasse !70 ans de Château Larcis Ducasse !

Belle journée ensoleillée en ce mercredi 20 November 2013 pour une grande verticale du Château Larcis Ducasse 1er Grand Cru classé de St Emilion. Nous sommes, Philippe D. et moi-même, reçus chaleureusement par le propriétaire Jacques-Olivier Gratiot, puis Nicolas Thienpont qui a la cogérance du Château depuis 2002, ainsi que l’œnologue du Domaine David Suire et Blandine Giambasi notre hôtesse de la journée. Le Domaine est conseillé depuis 2002 par Stéphane Derenoncourt qui est aussi présent à cette journée. D’autres grandes personnalités du monde du vin seront d’ailleurs aussi présentes à cette dégustation.

Un petit rappel historique pour dire que les vins de Larcis Ducasse étaient quand même déjà bus au XVIème siècle ! 10,8 hectares de vignes sur la côte de Pavie. Une exposition plein sud avec un terroir en terrasses.  Le Château est actuellement planté de 78% de Merlot, 20% de Cabernet Franc et 2% de Cabernet Sauvignon. Les vignes ont un âge moyen de 35 ans.

Dès notre arrivée, nos hôtes nous mettent à l’aise et je reconnais tout de suite une attention sincère et nous avons tout de suite l’impression de faire partie de la famille. D’ailleurs, cette impression restera durant toute la journée.

Nous allons commencer par 7 séries de quatre à cinq vins servis en magnums ou doubles bouteilles. Ensuite, un repas sera servi avec les bouteilles ou les magnums que les participants auront aimés. La dégustation ne sera pas à l’aveugle.

On commence avec la première série de vin des années 40 à 50. Quel honneur d’ailleurs de pouvoir goûter des flacons aussi vieux gardés aux Châteaux. Un grand respect doit toujours nous animer lors de leur dégustation.

Château Larcis Ducasse 1940 (en bouteilles)

Couleur de café. Nez profond de thé noir. La bouche est superbe avec une extrême finesse. Les arômes de thé noir se retrouvent avec une certaine discrétion. Certes le vin n’est pas d’une grande longueur, mais quelle élégance.

Château Larcis Ducasse 1945 (en bouteilles)

Couleur plus sombre, le nez me rappelle le pied de mouton et le menthol. La bouche est aérienne et d’une grande finesse. Les tannins sont fins et légèrement asséchants en final. Belle acidité.

Château Larcis Ducasse 1952 (en magnum)

Nez impressionnant de pruneau et de cerise noire avec des notes alcooleuses.  En bouche, on retrouve les arômes de pruneau confit et de fruits noirs. Le vin commence certes avec un peu d’amertume, mais ensuite quelle richesse ! Dommage qu’il ne soit pas plus long.

Château Larcis Ducasse 1955 (en bouteilles)

Je retrouve une similitude de nez avec le 1945, même si celui-ci à des notes d’écuries nobles, comme de chevaux persans . On se retrouve une fois encore sur un vin d’une grande finesse et d’une grande sensualité. Les arômes de thé noir refont surface après un instant et on apprécie ce vin d’une trame serrée et d’une belle longueur.

Château Larcis Ducasse 1959 (en magnum)

J’adore ce millésime qui me déçoit rarement. Ce magnum ne me décevra pas. Très beau nez profond et légèrement fruité. La bouche est encore jeune avec beaucoup de volume et de densité. Des notes de végétal qui donne une belle fraîcheur à ce vin. Il est large d’épaules et porte fièrement ce millésime parfaitement réussi chez Larcis.

On attaque la deuxième série avec les vins des années 60

Château Larcis Ducasse 1961 (en bouteilles)

Millésime mythique. Le nez est magnifique avec une grande densité et des notes de café. Ce qui est incroyable c’est que nous sommes face à vin de plus de 50 ans et il a gardé une jeunesse et une fraicheur étonnante. Il y a une belle matière et du volume. En comparaison du 59, le vin a plus d’acidité et de matière, mais peut-être moins de sensualité. Soyons honnêtes, nous sommes à un grand niveau et les deux vins sont exceptionnels.

Château Larcis Ducasse 1962 (en bouteilles)

Millésime souvent oublié probablement dû à son prestigieux voisin, le 1961 ! Le 62 montre souvent un bel équilibre alors que le style du 1961 est plus concentré en raisins dus à la sécheresse. Revenons sur notre bouteille, le nez est animal avec une odeur de gras de cochon ! Une fois le vin mis en bouche, on ne peut qu’apprécier cette superbe bouteille qui ce jour-là éclipsera pour un moment le 1961 ! La bouche est tannique, harmonieuse et d’un grand classicisme. Belle surprise.

Château Larcis Ducasse 1964 (en magnum)

Très grand millésime en Pomerol et en St Emilion. Les vendanges ont commencé le 21 septembre 1964. Nez de truffe. En bouche je trouve un manque de maturité avec des tannins serrés et secs en final. Nous sommes face à un vin certes difficile, mais qui garde une belle fraicheur et une jeunesse étonnante.

Château Larcis Ducasse 1966 (en bouteilles)

Encore une fois un millésime souvent oublié alors que la qualité des vins a été souvent remarquable. Le style de ce millésime est équilibre et finesse.  Le nez est fumé. On retrouve d’ailleurs ce fumé en bouche. Les tannins sont serrés, astringents et étriqués. Est-ce que ce millésime a tenu le poids des années ? En tout cas, je ne retrouve pas les caractéristiques du millésime. Je n’accroche malheureusement pas sur ce vin.

Château Larcis Ducasse 1967 (en bouteilles)

Beaucoup de verdeur et de vivacité comme le disait Pierre Boisset. Un millésime pas fait pour les rouges. Et pourtant le nez est sur les fruits rouges :-) La bouche est maigre avec de jolis fruits un peu confits. Les tannins sont crayeux et des notes végétales donnent à ce vin de la fraicheur. Étonnant au vu du millésime.

Nous allons attaquer maintenant une période plus difficile pour les vins de Bordeaux et les vins en général. Les années 70 avec ces millésimes compliqués, l’arrivée des recettes miracles et les excès en tout genre. Le Domaine aura d’ailleurs aussi des problèmes ce que narre parfaitement le propriétaire Jacques-Olivier Gratiot en disant que sa mère a dû vendre un bien immobilier important pour sauver le Château.

Château Larcis Ducasse 1970 (en magnum)

Couleur trouble. Nez discret. La bouche est peu exubérante, légère, mais le vin est facile à boire. Je trouve d’ailleurs que celui-ci n’est pas très net après un peu d’aération.

Château Larcis Ducasse 1971 (en magnum)

Année riche et puissante. Nez d’Humus. Etonnant au vu du millésime, la bouche est végétale avec de la longueur et de la fraicheur.

Château Larcis Ducasse 1975 (en magnum)

Nez végétal et relativement discret. Le vin est chaud, dur est peu digeste. Les tannins sont asséchants au final. Je pense que nous avons eu un problème de magnum, car une autre table a trouvé ce vin très beau… Bienvenu dans le monde du vin :-)

Château Larcis Ducasse 1978 (en magnum)

Très beau nez avec de la fraicheur. On retrouve cette fraicheur en bouche ainsi que des notes de champignons. La structure du vin est correcte et le vin tout à fait honnête et sera le meilleur de la série.

Après ces années difficiles, voici venu le temps pour les années 80 avec un ciel qui a tendance à s’éclaircir sur le Bordelais et le retour des grands millésimes. Nous sommes donc dans la 4ème série

Château Larcis Ducasse 1982 (en magnum)

Millésime mythique que l’on a plus besoin de présenter. Tous les convives se réjouissent de boire ce vin est là malheur… notre magnum est bouchonné ! Pas de chance, car il n’y avait pas de bouteilles/magnums de rechange.

Château Larcis Ducasse 1983 (en magnum)

Heureusement que ce magnum nous donnera de nouveau de belles sensations. En bouche, ce vin est jeune, profond et avec une grosse matière. Le plus beau de la série, ce qui pourrait paraître étonnant puisque le millésime n’était pas aussi grand que ça en St Emilion et en Pomerol.

Château Larcis Ducasse 1985 (en magnum)

La bouche est d’entrée sur des notes d’humus avec un côté dur et des tannins serrés. A notre table on se pose des questions sur le rendement qui semblerait important et la qualité des fûts… En tout cas un vin qui nous donne peu de plaisir.

Château Larcis Ducasse 1988 (en magnum)

Un vin strict, serré et droit. Un style très classique et que j’ai souvent retrouvé dans ce millésime avec des notes tertiaires et souvent peu aromatique. Un vin qui peut encore vieillir même si aujourd’hui il est resté un peu austère.

Château Larcis Ducasse 1989 (en magnum)

1ère: les tannins sont secs et asséchants. Le vin est peu avenant. On pense à un problème de bouchon.

2ème: Le vin est certes meilleur, mais la différence n’est pas aussi grande que ce que l’on pensait. Il est serré et rustique. Je ne trouve pas qu’il ressemble à la typicité des 89.

On finit cette série qui aura été difficile. Évidemment qu’un ou deux bouchons ont joué les troubles-fêtes et que les vins étaient peut-être en phase de fermeture. Je suis quand même étonné de ce millésime 1989 qui selon mes recherches semble magnifique et d’une grande qualité lors de précédentes dégustations.

Pour les séries suivantes, je vais rester plus vagues et je vais moins détailler les vins, car mon palais commence à se fatiguer et je trouve toujours plus difficile pour moi, de noter des vins jeunes.

La 5ème série nous emmène dans les années 90.

D’ailleurs, le Château Larcis Ducasse 1990 (en magnum) nous surprendra avec ce nez de chocolat et de cochon grillé (eh oui…) que nous avions déjà dans le 1962. Le vin est linéaire et les tannins manquent de finesse.

Le millésime suivant servi en bouteille est le Château Larcis Ducasse 1995. On change de style avec un boisé plus présent (il faut préciser que jusqu’à maintenant celui-ci était très discret et parfaitement fondu) et lactique. Le vin a aussi plus de fruits rouges et il est agréable à boire.

Les deux millésimes suivants de Château Larcis Ducasse 1997 + 1998 confirment le changement de style et on sent des vins durs, plus stricts.

Je suis quand même surpris par ces années 80-90. Je pense que le Château a connu à ce moment de son histoire un petit creux et qu’il recherchait sa place dans ce monde du vin très « parkérisé ». Il est évident que le style des vins de Larcis-Ducasse n’est probablement pas facilement un parkerisable, mais je sens dans ces années 80-90 qu’il manque un quelque chose pour retrouver les grands vins d’antan et retrouver ce terroir exceptionnel et digne des plus grands. La suite semble d’ailleurs le confirmer.

On continue avec les années 2000 à 2010 dans les 6ème et 7èmes séries qui se feront uniquement en magnum.

Dans les Châteaux Larcis Ducasse 2000 et 2001 ont sent du progrès et les nez sont sur les fruits rouges et le tabac. Les bouches sont équilibrées et vives. Les tannins sont beaux, mais il reste malgré tout encore un peu austère.

Châteaux Larcis Ducasse 2002 Nicolas Thienpont va entrer officiellement dans ses fonctions ainsi que Stéphane Derenoncourt pour superviser les vinifications et l’élevage. On va sentir un changement de style et une qualité qui ne va cesser d’augmenter. En bouche c’est épicé avec des notes fumées et de fruits noirs. La bouche est équilibrée, sans excès avec une belle trame dynamique et de velours. Des notes épicées ressurgissent en rétro-olfaction. Un vin d’une belle qualité pour ce millésime moyen.

On continue avec Château Larcis Ducasse 2004 et 2005 On sent la qualité du travail effectué. Le 2004 est d’une belle fraicheur avec des notes d’épices et de fruits noirs. La bouche a une belle texture et beaucoup de finesse. Il a aussi de la longueur et les tanins sont bien intégrés. Pour le 2005 on reste sur les mêmes notes aromatiques avec encore plus de profondeur et de densité. En bouche, c’est la même chose avec toujours cette souplesse et cette finesse. Belle présence tannique et grosse acidité ce qui va l’apporter loin. Une magnifique bouteille.

Pour les millésimes du Château Larcis Ducasse 2006, 2007 & 2009 on continue à se rendre compte de la progression et de la direction prise. Beaucoup de noblesse et de finesse dans les tannins et le vin. On ressent de nouveau cette fraicheur et cette vivacité. La matière est présente même dans des millésimes moins faciles et on sent beaucoup de précision.

On finit avec Le Château Larcis Ducasse 2010 Un grand moment et une superbe bouteille, ou plutôt magnum…. Nous sommes face à un vin qui est en parfaite symbiose de toutes les qualités du Château. Longueur, puissance tout en gardant cette trame fine et élégante. De la fraicheur et beaucoup de noblesse. Je suis sous le charme et je pense que l’avenir de cette propriété que je connaissais d’ailleurs très peu à un avenir radieux.

On continuera la journée avec un repas  concocté par le restaurant Le St James.

- Pibales « dans la tradition »

- A…louette, je te mangerai !

- Palombe de chasse « Iraty » grillée au feu de bois

- Lièvre à la Royale

- Saint-Nectaire fermier

- Choco-persil & ananas meringué & piquillos & biscuit salé

En résumé une journée mémorable avec des gens sympathiques et accueillants. Une dégustation toujours difficile pour des gens comme moi qui refusent de cracher les vins quand ils sont excellents. D’ailleurs, cette verticale aura montré beaucoup de belles bouteilles/magnums. Il est toujours intéressant de voir comment un vin et un domaine peuvent évoluer durant 70 ans. On sent les différences de styles, les années difficiles ou non. Ce qui m’a particulièrement touché c’est que lors d’une dégustation comme celle-ci, il y a une sorte d’intimisme, puisque les propriétaires – en dévoilant leurs trésors un par un sur près d’un siècle – nous ouvrent une partie de leur vie et de leur passion.

Un grand merci encore une fois à Philippe D. qui m’a permis de participer à ce moment magique ainsi qu’à nos hôtes, le propriétaire Jacques-Olivier Gratiot, ainsi que Nicolas Thienpont et David Suire. Un grand merci aussi à Blandine pour son dévouement et sa disponibilité durant cette journée.

Un dernier mot encore pour signaler que Jacques-Olivier Gratiot a écrit un essai  »tu renaîtras » qui parle de l’âme et plus particulièrement de l’âme explorée. Un voyage qui passera bien entendu par le vin et le Château. Vous trouverez son livre sous le site internet de l’éditeur L’Harmattan (http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=numero&no_revue=&no=41695).

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écrit par | Publié dans: Dégustations et soirées thématiques | Mots clefs: ,

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